Ru Ru

D) Régions

Leonid Korytny
1 novembre 2017

Les problemes ecologiques du lac Baïkal et de son environnement

Le Baïkal est l’un des plus grands lacs du monde. Il s’étend, du nord au sud, sur six cent trente-six kilomètres, pour une largeur de quatre-vingts kilomètres et une superficie en eau de 31,5 mille kilomètres-carrés. Le Baïkal est également le lac le plus profond de la planète : sa profondeur maximale est de mille six cent trente-sept mètres, sa profondeur moyenne de sept cent trente mètres. Le lac contient 23,6 mille kilomètres-cubes d’eau douce, soit 20 % des réserves mondiales des lacs et 5,5 % de l’eau douce de la planète répondant aux critères les plus élevés de qualité et de pureté.

Les mécanismes d’auto-purification du Baïkal, qui rapprochent son eau de l’eau distillée, sont sans égal : une eau saturée d’oxygène, avec une quantité minime de sels minéraux et de substances organiques. Sa transparence est telle qu’elle permet de voir jusqu’à quarante mètres de profondeur, soit dix fois plus que les autres grands lacs. La température à la surface des parties ouvertes du lac varie selon les saisons, de proche du zéro à quatorze degrés ; à une profondeur de trois cents mètres et jusqu’au fond, elle est quasi constante (3,4-3,1 degrés). En d’autres termes, la majeure partie des eaux du Baïkal constituent, de fait, une sorte de thermostat naturel. À trois-cinq kilomètres de la rive abrupte du nord-ouest et à une un peu plus grande distance de la rive en pente douce de l’est, on trouve des zones d’environ un kilomètre de largeur, dans lesquelles les eaux de la surface descendent directement au fond (les « fronts »), et cela vaut pour toute l’année. De la sorte, les régions proches du fond sont emplies d’une eau qui se régénère constamment, recelant une grande quantité d’oxygène, de substances organiques fraîches et d’autres mélanges en suspension, le tout jouant un rôle essentiel dans le bon développement du biote.

L’écosystème du Baïkal renferme une multitude de particularités exceptionnelles qui en font l’un des sites naturels les plus remarquables qui soient. Le Baïkal est le seul lac d’eau douce profond dans lequel la vie existe jusqu’au fond. Sa flore et sa faune sont uniques par leur variété et l’endémisme des espèces qui y vivent. Plus des deux tiers des deux mille sept cents espèces végétales et animales répertoriées à ce jour, ne se trouvent que là. Le Baïkal est l’un des centres mondiaux de spéciation, un laboratoire naturel de l’évolution et le sanctuaire d’une vie originelle. Les profondeurs du lac continuant d’augmenter (à l’échelle du temps géologique), on voit se former de nouvelles niches écologiques, base d’une constante spéciation et d’un accroissement de la biodiversité.


Le Baïkal doit son caractère unique tant à son histoire géologique qu’aux conditions actuelles de son environnement naturel. Le lac est situé dans une très ancienne zone de divergence des masses continentales (rift), qui continue d’évoluer. On évalue l’âge du lac à 20-25 millions d’années, inscrites dans l’épaisseur, sur des kilomètres, des roches sédimentaires. Il constitue également le noyau des origines du monde, conservé depuis l’Archéen, la chronique de la vie terrestre depuis des milliards d’années. Un ensemble de dépressions et de collisions forme la base de l'ossature écologique de ce territoire.

Les paysages présents dans le bassin du lac et toute la région alentour, combinent toundras, taïgas et steppes, dues à la structure géologique, aux modes de circulation de l’air, aux particularités biogéographiques et à la nature de leur contact. Des effets de bassin et de piémont, ajoutés à une variation importante des hauteurs, entraînent diversité et contraste des conditions naturelles. L’interpénétration de différents systèmes naturels est l’une des grandes caractéristiques du paysage. La taïga montagneuse y domine, très variée voire contrastée, depuis des conifères, y compris des sapins, jusqu’à des mélèzes de la taïga, ce qui s’allie parfaitement à l’extraordinaire diversité des conditions hydrothermales qui caractérise également ce territoire.

L’immense importance du lac apparaît dans de nombreux documents russes et internationaux. En 1996, l’UNESCO inscrit le Baïkal et son environnement au Patrimoine mondial de l’humanité, considérant qu’ils représentent l'exemple le plus extraordinaire d'écosystème d'eau douce. En 1999, une loi – la seule loi d’importance fédérale adoptée pour un site régional – est entérinée en Russie, relative à « la protection du lac Baïkal ». En complément, l’Institut de géographie V.B. Sotchava de l’Académie des sciences élabore un programme de zonage écologique. Trois zones sont ainsi mises en évidence sur le territoire du Baïkal : une zone centrale (l’environnement immédiat), une zone-tampon (le reste du bassin du lac dans les limites de la Russie) et une zone d’influence atmosphérique (1).

Le rôle mondial du Baïkal ne cesse de croître. Estimation, protection et optimisation des ressources naturelles – dont les ressources en eau sont parmi les plus importantes – constituent l’un des problèmes actuels les plus urgents. Le manque croissant d’eau pure dans le monde détermine le rôle majeur du Baïkal pour les générations futures. La situation allant s’aggravant, le rôle géopolitique de la Russie – et en premier lieu du lac – dans cette question peut devenir un rôle clef. En même temps, les eaux du Baïkal sont la base de l’énorme potentiel d’énergie hydraulique de la région, là encore d’importance mondiale. Ce lac unique attire, tel un aimant, des touristes du monde entier, de plus en plus nombreux chaque année. En outre, l’immense portée scientifique des multiples recherches effectuées sur le Baïkal a fait de celui-ci, depuis longtemps, l’un des plus célèbres « laboratoires scientifiques » de la planète, et le nombre de problèmes passionnants qui y sont résolus va croissant.
Des problèmes écologiques du Baïkal



On peut discuter sans fin de ce sujet, chaque autorité scientifique ayant sa vision des choses. En me fondant sur ma longue expérience de l’étude des problèmes écologiques de la planète, du pays et de la région du Baïkal (2), je proposerai au lecteur ma liste des problèmes prioritaires et m’efforcerai de la justifier brièvement. Précisons que les problèmes du lac ne sauraient être détachés de ceux de l’environnement proche, autrement dit de la Zone écologique centrale, dont les limites peuvent aller jusqu’à soixante ou quatre-vingts kilomètres de la rive. Comme il sera montré plus loin, tous les problèmes ne sont pas – il s’en faut de beaucoup – d’origine humaine, il convient également de prendre en compte les particularités des processus naturels.

Je place au premier rang, par ordre d’importance, la liquidation des rejets – boues résiduaires avec lignine – de l’usine de cellulose et de pâte à papier, qui, pendant un demi-siècle, a fonctionné directement sur la rive du Baïkal. Elle a enfin été fermée il y a quelques années, mais des tonnes de rejets continuent de polluer les eaux souterraines et, par conséquent, le lac ; pire, on court à chaque instant le risque d’un effondrement des amas et de coulées de boues. Il s’est accumulé pour cela, depuis 1971, suffisamment de matières sur la crête de Khamar-Daban, juste au-dessus du Baïkal. Ajoutons qu’une bonne averse serait susceptible d’emporter le tout dans le lac. Pendant que l’on discute technologie d’utilisation des rejets, il est urgent d’organiser une protection sûre contre ces coulées.

Le problème suivant porte également l’indiscutable marque des activités humaines. Il s’agit de la pollution des eaux proches de la rive par des composés organiques, des microorganismes et des métaux lourds mêlés de polluants. Ils passent dans le lac en même temps que les rivières (en premier lieu, la rivière Selenga). Les eaux usées des localités et des bases touristiques situées sur les rives ne sont pas assez épurées (ou ne le sont pas du tout), pas plus que les matières fécales et les résidus des cales des bateaux de plaisance et des petits vapeurs. Les raisons en sont évidentes : elles viennent du fonctionnement défectueux des installations de traitement des eaux (sur les trente qui existent dans la Zone centrale, seules deux marchent selon les normes en vigueur) ou de leur absence pure et simple. Il en va de même pour les installations à même d’évacuer les rejets des bateaux aux accostages. Le problème ne réside pas uniquement dans des moyens éternellement insuffisants, mais aussi dans l’absence, à ce jour, de technologies adaptées au Baïkal (particulièrement en ce qui concerne le tourisme).

L’une des incidences de ce qui vient d’être dit est sans doute « l’explosion », ces dernières années, dans la zone proche de la rive, là où l’eau est basse, d’algues vertes, notamment de type spirogyre, qui forment sur les berges des amas en décomposition. Les spécialistes « pèchent » particulièrement par un excès de composés du phosphore dans les produits détergents utilisés. Toutefois, là comme dans d’autres processus hydro-biologiques, tels que la modification des maillons trophiques de l’hydro-biocénose dans les zones proches de la rive, au profit d’« envahisseurs » (élodée du Canada et autres), ou la triste disparition, ces dernières années, d’une part importante des éponges – les Lubomirskidés –, il est indispensable de faire le lien avec le réchauffement climatique, l’apparition de nouvelles tendances géophysiques, concernant, en premier lieu, la température de l’air et de l’eau, le régime des glaces. Il importe aussi de considérer l’origine de certains processus cycliques ou successionnels dans la biocénose aqueuse, qu’il faut tenter, encore et encore, de comprendre.

Les feux de forêts causent également des dégâts énormes depuis quelques années, surtout pour les zones naturelles particulièrement protégées : réserves et parcs nationaux. Il convient d’évoquer ici le « facteur humain », non que les hommes soient forcément à l’origine des incendies (la plupart de ceux qui se déclarent dans les régions difficiles d’accès sont dus à des orages secs), mais parce que les veilles sont de mauvaise qualité et, plus encore, en raison des retards chroniques des pompiers, des défauts d’équipements et autres.

Le problème des aires de loisirs comporte de nombreux aspects, bien que l’organisation du tourisme sur le Baïkal soit une incontestable priorité. Parmi les facteurs négatifs, on retiendra : une charge trop lourde ; des ordures abandonnées près de ou sur la berge, en premier lieu dans les zones de tourisme sauvage ; le non-respect des routes et des chemins dans les zones de steppe et de steppe boisée, notamment par les VTT ; l’absence de zones de loisirs bien définies et d’un même ensemble de règles pour ce type d’activité.

Le dépérissement de la flore et de la faune, en particulier d’espèces rares, souvent dû au braconnage, est, sans conteste, un autre phénomène négatif. Mais il s’agit là d’un problème complexe. Les scientifiques divergent dans leurs estimations du nombre des ciscos – poissons caractéristiques du Baïkal. Les uns considèrent qu’ils ont tellement diminué qu’il faut, dès à présent, en interdire la pêche ; d’autres contestent ce point de vue, affirmant que leur nombre n’a pas nettement baissé ; simplement, les poissons se sont éloignés des rives et « cachés » dans les profondeurs.

Nombre de problèmes sont liés à des lacunes dans la législation, principalement au niveau fédéral, sources de flou sur le terrain juridique, avec de graves conséquences. On continue ainsi, entre municipalités et propriétaires privés, à se disputer les terres, surtout dans les zones naturelles protégées, et l’on en vient parfois à porter la querelle devant les tribunaux. En 2015, une erreur administrative dans la Résolution relative à l’alignement des limites de la zone de protection de l’eau du lac et de la Zone écologique centrale, a été très néfaste, paralysant de fait toute activité économique sur les rives du Baïkal. Il a fallu plus d’un an pour démontrer l’évidence de cette erreur et commencer à la corriger en définissant les limites de la zone de protection de l’eau selon la méthode proposée, depuis plus de dix ans, par l’Institut de géographie V.B. Sotchava (3). La décision adéquate a enfin été prise au niveau du ministère des Ressources naturelles et de l’écologie. Reste maintenant à l’appliquer.

On n’a pas le temps de résoudre les problèmes anciens que de nouveaux apparaissent. C’est ainsi que, ces dernières années, on prévoit de construire une centrale en amont du principal affluent du Baïkal, la Selenga (qui fournit la moitié des eaux se jetant dans le lac), c’est-à-dire en Mongolie. Cela ne peut que se répercuter sur le lac, moins sur la quantité d’eau que sur la transformation du régime hydraulique ; des conséquences regrettables sont également possibles du côté des hydro-biocénoses. Il va de soi que scientifiques, écologistes et autorités de la région s’en alarment. Mais en tant qu’État souverain, la Mongolie a le droit de disposer à son gré de ses ressources en eau, y compris pour accroître sa sécurité énergétique. Elle ne refuse toutefois pas le dialogue sur le sujet. Il faut une évaluation scientifique mûrement pesée de toutes les conséquences et alternatives possibles (fourniture d’énergie par la Russie, énergie solaire et éolienne) – évaluation en cours au centre de recherche de la Section sibérienne de l’Académie des sciences, à Irkoutsk. Cette évaluation a vocation à se substituer aux interventions actuelles, uniquement émotionnelles, particulièrement dans les médias.

Les intérêts du Baïkal

La résolution des problèmes est compliquée par les diverses priorités de différents groupes de la société. On peut, grosso modo, distinguer huit groupes d’intérêts : la protection de la nature, les ressources en eau, les ressources halieutiques, l’énergie, les loisirs, la recherche scientifique, les sciences humaines (les ethnies, le sacré), l’économie. Au niveau planétaire, le Baïkal est avant tout une réserve stratégique d’eau douce. Il est une part de l’héritage mondial et un laboratoire également mondial ; autrement dit, les intérêts « ressources en eau », « protection de la nature » et « recherche scientifique » l’emportent à ce niveau. À l’échelle de la Russie, on déclare généralement prioritaires la protection de la nature (en se référant à la loi fédérale sur le Baïkal), les loisirs, la recherche scientifique et d’autres choses encore, mais ce sont surtout des mots qui ne s’accompagnent pas des moyens indispensables que mérite le grand lac. On ne peut pas dire qu’à l’échelon national on porte au Baïkal l’attention prioritaire qu’il mérite.

Tout se complique encore au niveau régional, où les intérêts des deux « sujets » de la Fédération concernés sont souvent contradictoires. Si, pour la région d’Irkoutsk, les intérêts principaux sont de type énergétique et, partant, d’ordre économique, la République de Bouriatie, elle, met avant tout l’accent sur les loisirs et « joue » au maximum la carte sciences humaines. En même temps, « l’intérêt » énergétique est pour elle plutôt marqué d’un signe négatif, si l’on considère les énormes – et injustes – différences de tarifs de l’énergie entre la région et la république. La protection de la nature ne peut, de fait, être une priorité, la Bouriatie enregistrant des pertes économiques en raison des restrictions dans ce domaine. Il en va de même, au demeurant, pour la région d’Irkoutsk, en ce qui concerne directement le Baïkal, la plupart des graves problèmes écologiques concernant d’autres territoires.

Au niveau local – celui des intérêts de la population vivant sur les rives du lac – il n’y a pas, en règle générale, de coïncidence avec les intérêts des autres couches de la société. Pour la majorité de la population, l’intérêt n°1 est le poisson, principal moyen de subsistance, et la moindre limite imposée à la pêche des ciscos est très douloureusement ressentie. Depuis quelque temps, le secteur des loisirs prend de la vigueur, autrement dit le travail dans les entreprises qui s’occupent des infrastructures dans ce domaine au développement rapide, ainsi que l’accueil des touristes chez l’habitant. Pour la population bouriate, l’aspect ethnique et religieux est également important, mais on ne saurait le ranger dans les priorités.

Quelques pistes pour résoudre les problèmes

Pour résoudre efficacement les problèmes du lac et de son environnement, il est indispensable, de mon point de vue :

– de déclarer prioritaires, à l’échelle du pays, les problèmes du Baïkal, en dotant la région d’un financement adéquat (au niveau des projets nationaux de type sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique – APEC – à Vladivostok, construction d’un cosmodrome à Svobodny, Jeux olympiques de Sotchi, Coupe du monde de football…) ;

– de combler les « lacunes » juridiques par un système de rectification des documents officiels au niveau fédéral et régional, en y intégrant les niveaux de performance ;

– de sélectionner les technologies de traitement des eaux usées, de recyclage des déchets solides, de collecte des eaux de cale des navires… à la fois les plus efficaces et les plus économiquement accessibles, en les adaptant aux conditions du Baïkal ;

– d’organiser la production et le tourisme dans la région selon les principes de l’« économie verte », garantissant de nombreux emplois et un niveau de vie adéquat pour la population locale ;

– de mettre en valeur le territoire du Baïkal et de ses environs d’après les principes de l’aménagement du paysage, y compris en fixant des limites pour la Zone d’eau et pour tous ceux qui exploitent la terre dans la région ;

– d’instaurer un système de veille perfectionné, combinant les réseaux d’observation non coordonnés des ministères et leurs documents ;

– de poursuivre la recherche scientifique sur les écosystèmes du Baïkal et de son environnement, en utilisant les méthodes et les appareils les plus modernes ;

– d’assurer constamment, auprès de la population de la région, l’éducation, la pédagogie et la propagande des valeurs écologiques ;

– d’effectuer un travail ciblé dans les médias et sur internet pour porter à la connaissance de la communauté nationale et internationale le rôle particulier de ce lac unique, une information véridique sur son état et les problèmes écologiques, afin de rehausser l’image du Baïkal et de créer les conditions nécessaires à l’augmentation des flux d’investissements et de touristes ;

– d’optimiser la gestion du développement socioéconomique de ce territoire naturel sur la base des priorités de la protection de la nature et en tenant compte des restrictions écologiques, sur le modèle, par exemple, de la Corporation de développement du territoire naturel du Baïkal ; c’est d’une importance extrême, car le lac et son environnement doivent être perçus comme un tout pour ce qui touche à sa gestion, son contrôle et sa régulation.

Pour renforcer les décisions concernant toutes les tâches, étape par étape, sans contradictions, en les plaçant dans un seul et même système, le projet national « Le Grand Lac d’un Grand Pays » est en cours d’élaboration. L’idée majeure en est la préservation de l’écosystème unique du Baïkal, la création des conditions et possibilités d’un développement économique de cette zone, visant à réduire au maximum l’impact négatif sur le milieu, dans le cadre de l’application d’une politique d’État coordonnée. Le projet est conçu à l’initiative et sous la direction du Centre d’analyse près le gouvernement de la Fédération de Russie, il regroupe des experts scientifiques de Moscou, Irkoutsk et Oulan-Oude, avec la participation du ministère des Ressources naturelles et de l’Écologie, des autorités de la région d’Irkoutsk et de la république de Bouriatie. La réalisation de ce programme est prévue à la fois sur le court terme (les deux prochaines années pour les premières mesures) et à plus long terme, jusqu’en 2025. On se propose de faire fusionner les moyens des programmes fédéraux et des projets locaux existants, les budgets correspondants, et de chercher des compléments du côté des partenariats publics/privés.

Les mesures envisagées par le projet vont dans quatre directions principales : « Protection du milieu aqueux et de la biodiversité », « Modernisation des systèmes favorisant la vie et liquidation des nuisances accumulées », « Milieu d’affaires et infrastructures », « Tourisme : utiliser le potentiel tout en préservant la nature ». S’y ajoutent une série de sous-projets transversaux : meilleure qualité des règlements normatifs et juridiques, recherche et veille, nouveaux mécanismes de financement des activités de protection de la nature, bénévolat et responsabilité socio-environnementale, entre autres. On prépare des passeports pour tous ceux qui sont susceptibles de concrétiser ces mesures ; on déterminera ensuite les sources de financement ; enfin, on s’attaquera à la résolution des problèmes. En Russie comme dans le monde, on considère avec espoir cette nouvelle tentative de résoudre les problèmes du Baïkal en les envisageant dans leur complexité.

Toutes les questions concernant la gestion du système géographique (du géo-système) « Baïkal » doivent être abordées dans un contexte international, compte tenu de l’importance mondiale du lac. Au niveau macrorégional, il convient de considérer les intérêts des plus proches voisins (l’exemple de la centrale hydroélectrique de Mongolie est caractéristique) et de lier les problèmes de la région aux intérêts du Corridor économique Chine-Mongolie-Russie, notamment à l’initiative chinoise des nouvelles Routes de la Soie et à la nécessité de moderniser radicalement le Transsibérien, en particulier si l’on prévoit de construire une ligne à grande vitesse (4).

Un rôle particulier est dévolu à la cartographie sur la base des technologies SIG (Système d’information géographique). L’édition d’un Atlas écologique du bassin du lac Baïkal en a été une étape importante. Le bassin y est perçu comme une région à part, transfrontalière, partie intégrante des systèmes territoriaux de développement de Russie et de Mongolie (5). En termes de contenu, la combinaison des facteurs économiques, sociaux, démographiques, ainsi que des facteurs concernant les ressources naturelles et des facteurs biotiques de formation du contexte écologique, a été possible grâce à un programme complexe, spécialement conçu, de cartographie électronique, considéré comme la mise au point d’une information objective et accessible sur le territoire étudié, en vue de régler les problèmes posés par sa cartographie écologique intégrale. L’atlas comprend cent quarante-deux cartes à l’échelle 1 : 5 000 000 pour les cartes concernant les facteurs naturels, et 1 : 6 000 000 pour celles des facteurs socio-

économiques de formation du contexte écologique. Il se compose de huit blocs : un bloc introductif et sept thématiques. La variante chiffrée de l’atlas se trouve, sous forme de ressource électronique, avec une base de données, sur le site du Centre d’information du Baïkal. Une version papier est disponible en russe, anglais et mongol. Pour la première fois, l’atlas reflète les configurations spatiales de la formation du contexte écologique sur tout le territoire du bassin du Baïkal, permettant de déterminer et de fonder, en perspective, les axes d’une évolution territoriale équilibrée et durable de la Russie et de la Mongolie.

Le bloc international et le bloc cartographique complètent le mode de régulation du géo-système « Baïkal », lequel n’a pas seulement vocation à résoudre les problèmes de développement socioéconomiques (avec une orientation écologique) du lac et de son environnement, mais peut aussi servir de modèle pour des territoires dont la priorité est la préservation de la nature.

***

1. I. Vladimirov, L. Korytny, V. Plioussine, A. Sorokovoï, « Issledovania Institouta gueografii im. V.B. Sotchavy SO RAN na Baïkalskoï prirodnoï territorii » [Recherches de l’Institut de géographie V.B. Sotchava, Section sibérienne de l’Académie des sciences], Gueografia i prirodnyïe ressoursy, n° 5 (numéro spécial), pp. 6-14.

2. Leonid Korytny, Ekho ekolo-ekonomitcheskikh skandalov [L’écho des scandales écolo-économiques], Izdatelstvo SO RAN, Novossibirsk, 2011.

3. N. Vladimirov, L. Korytny, V. Plioussine, A. Sorokovoï, « Issledovania Institouta gueografii im. V.B. Sotchavy SO RAN na Baïkalskoï prirodnoï territorii » op. cit.

4. Zona Transsiba kak evraziïski ekonomitcheski koridor [La zone du Transsibérien comme corridor économique eurasiatique], L. Korytny (réd.), Izdatelstvo Institouta gueografii V.B. Sotchavy SO RAN, Irkoutsk, 2016.

5. Ekologuitcheski atlas basseïna ozera Baïkal [Atlas écologique du bassin du lac Baïkal], A. Batouïev, L. Korytny (dir.), Irkoutsk, Oulan-Bator, Oulan-Oude, 2015.